Chronique du roman de Julia Richard : Carne

Un improbable mélange de gore déjanté et de réflexions acerbes sur notre société.

Le roman

Genre : fantastique

Éditions HSN
Disponible en versions brochée et numérique

Résumé

OK GOOGLE, ÇA CORRESPOND À COMBIEN DE CALORIES UN CORPS HUMAIN ?

Simon ne va pas bien. D’ailleurs, depuis qu’il s’est mis à vouloir manger de l’humain, les choses ne tournent pas bien rond dans sa tête. Face à une société qui les traite, lui et ses congénères, comme des zombies, il fait de son mieux pour garder sa dignité, s’occuper de sa famille et être professionnel au bureau. Mais comment rester soi-même quand la faim frappe à la porte avec autant de délicatesse qu’un tank sur un champ de mines ?
Contraint à gérer son état parasite en maintenant l’illusion de la routine, il décide d’en faire une histoire de famille. Et vous savez ce qu’on dit sur les histoires de famille ?
C’est toujours un sacré bordel.

Et si on avait une bonne excuse pour croire à une apocalypse zombie ? Comment réagiraient les populations ?
Les gouvernements ? Quel impact auraient nos médias ?
Comment pourrions-nous être sûrs d’être dans le camp des héros ?
Et que feraient ceux à qui on donne le mauvais rôle ? La culture de masse nous fait fantasmer les zombies, mais s’ils devenaient notre quotidien, qu’en ferions-nous ?
Un postulat de départ sombre pour une fable d’anticipation sociale aux notes pop et punk.

couverture du roman Carne

Mon avis

Ce roman est un OLNI. Objet Littéraire Novateur et Incongru.

Si l’emballage – pardon, la couverture – ne suffisait pas, la table des matières annonce d’emblée la couleur : attention, vous mettez les pieds en territoire inconnu. Jugez plutôt :

Table des matières de Carne

À ne pas mettre entre toutes les mains, il présente des scènes gore écrites avec une telle quantité d’humour (noir) qu’elles en deviennent délicieusement digestes.

Mais l’essentiel du récit nous plonge surtout dans les pensées du personnage, alternant entre pulsions inavouables – cannibales et incestueuses –, désorientation psychologique et réflexions sociétales critiques et acerbes plus ou moins poussées, sur des thèmes aussi divers que la normalité, le travail, le viol, la télé-réalité, ou encore les habitudes de consommation.

Et même si la fin ne m’a pas entièrement convaincue, même si le livre est d’une dureté que seul son ton drôle et mordant parvient à nous faire avaler sans nous perforer l’estomac, c’est une de ces lectures dont on sort en se disant « Waouh ». Et en se demandant un peu ce qui vient de nous rouler dessus.

J’ai du mal à trouver les mots pour en dire davantage, alors je vous laisse avec ceux de l’autrice, dans les quelques extraits qui suivent et l’aperçu très insuffisant qu’ils esquissent de cet OLNI.

Quelques extraits

Oui, tout va bien. Tout va bien. Tout va bien. Tout va biiiiiiiien. Je vais bien. Je vais TRÈS bien. Je ne suis pas du tout en train de penser que le pénis du copain de ma fille ferait une excellente chipolata. Naaaan. Du tout, du tout, du tout. Parce que si c’était le cas, qu’est-ce que ça ferait de moi ? Un taré ? Un cannibale ? Un pédophile ? Un taré-pédophile-cannibale ? Est-ce que pédophile va devant ou derrière cannibale dans l’appellation ? Excellent « ice-breaker » en soirée.

Je crève la dalle. Je n’arrive plus à penser qu’à ça. Je lorgne sur ma femme, et je refuse de lui faire l’amour de peur de me laisser aller à plus…
À la limite, un cuni une semaine de règles… Allez quoi, juste un amuse-bouche !
Non ! Vilain Simon ! Pas bien !

Mais en vrai, tout le monde continue sa vie malgré les circonstances. Personne ne prend le recul de se dire que ça dépasse le cadre classique. Personne ne veut reconnaître le danger dans son quotidien. La masse ne croit pas à la fin du monde tel qu’on le connaît. Ils sont tous trop individualistes pour essayer d’aider les malades et trouver une solution durable à un problème qu’on imagine individuel, mais surtout, temporaire.

Du pain béni pour le gouvernement. Car si nous avons affaire à une guerre et non à une crise, alors l’ennemi est responsable, et pas ceux qui sont aux manettes.

OUI ! REPRENONS UN CHIEN ! OUI ! WAF WAF !
J’ai très envie de reprendre un autre chien. Parce que notre teckel me manque, bien sûr, mais aussi parce que je veux pouvoir le promener de nuit avec une pelle. PAF PAF !

Personne ne devrait avoir à voir son père perdre les pédales et s’en occuper sans savoir quoi faire.

Les femmes ont appris à souffrir, se démerder, et maintenir les apparences pour notre petit confort masculin. Parce que oui, voir du sang rouge pour des pubs de tampons ça nous semble dégueulasse à nous les hommes, et on se serait bien passés de cet effet du féminisme.

Au bilan

Un livre qui remue les tripes et les méninges. À découvrir, à condition d’avoir l’estomac bien accroché.



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