Avis sur Paris Hollywood de Cécile Mury
Immense coup de cœur pour cette comédie romantique drôle et rythmée, à la plume alerte et inventive.
Le roman
Genre : comédie romantique
Éditions Flammarion
Disponible en versions brochée, numérique et audio
Résumé
Paris, hôtel Meurice. Marianne Corvo, journaliste ciné pour un hebdo culturel, se prépare à interviewer son fantasme numéro un : Ben Whyte, dieu ombrageux du box-office et sex-symbol planétaire. Mais une fois devant LE monstre sacré, l’envoyée (un peu trop) spéciale perd le nord, enchaîne les gaffes et provoque l’hilarité de l’acteur, séduit par sa maladresse. C’est le début d’une histoire d’amour irrésistible et semée d’embûches, entre Paris et Hollywood.
Une comédie romantique au charme fou et débordante d’humour.

Mon avis
Évidemment, quand on lit le résumé, on se dit “OK, encore une de ces comédies romantiques comme on en a déjà vu des centaines, ça va être Coup de foudre à Notting Hill avec les rôles inversés”.
On pourrait difficilement se tromper davantage.
Alors, sur le fond de l’intrigue, certes, il ne faut pas espérer une extraordinaire originalité : il s’agit en effet d’une comédie romantique entre un acteur star et une journaliste ciné. Pas de quoi s’extasier, même si l’autrice – elle-même journaliste ciné à Télérama – sait de quoi elle parle, et que la peinture sans concession qu’elle brosse des dessous du milieu du cinéma hollywoodien et des secrets de fabrication de ses blockbusters vaut en soi déjà le détour.
Non, c’est tout le reste, qui m’a époustouflée – et je pèse mes mots.
La plume, d’abord. Magnifique. Toujours juste. Alerte et inventive, avec un sens aigu de la formule qui vient sublimer une mise en scène impeccable.
La mise en scène, d’ailleurs. Parlons-en. Travaillée avec minutie, si bien que le jeu permanent entre les personnages et le décor choisi pour chaque scène s’avère extrêmement réjouissant. Même un minuscule et banal appartement parisien – entre fauteuil de bureau vagabond, cafetière italienne vintage sur plaque électrique capricieuse, et salle de bains exiguë – devient une arène exotique que l’autrice parvient à exploiter à la perfection pour renforcer l’effet qu’elle souhaite produire sur son lectorat.
Les personnages, ensuite, tous plus vivants que nature. Marianne, bien sûr, avec ses gaffes hilarantes, ses émotions à fleur de peau, ses doutes, ses passions, ses sursauts de fierté, ses peurs, ses failles… Tout ce qui fait d’elle un être humain si attachant, qu’on aime suivre au fil des pages. Ben Whyte aussi, oui, avec ses contradictions, et malgré – c’est dire ! – son comportement toxique avec certaines des personnes qui travaillent pour lui, parce que derrière ce qu’Hollywood a fait de lui, il reste lui aussi un être humain – que Marianne va d’ailleurs faire souffrir, parfois, à force de ne voir en lui que l’image de la star, invincible. La famille de Marianne, en particulier sa sœur et son époustouflante maîtrise de l’anglais 🤭, et la fabuleuse innocence de sa nièce. Ses amis, notamment l’inénarrable duo formé par Jean le blasé et Serge l’enthousiaste. Et tous les autres, de VTT à Martin, en passant par Lancelot Duvernet, Clément, ou Carmine.
La structure, enfin. Une masterclass à elle seule. La construction du roman est impeccable dans son ensemble, et la construction de chaque chapitre l’est tout autant. Une fractale parfaite, dans laquelle aucune ligne n’est superflue, et qui témoigne d’une maîtrise du rythme impressionnante.
Et puis, surtout, l’humour. Du début à la fin, entrecoupé d’autres émotions (oui, j’ai aussi pleuré, par moments), mais toujours présent. Qu’est-ce que j’ai ri, bon sang ! Et qu’est-ce que ça fait du bien, dans une période aussi sombre que celle que l’on vit.
Et je passe sur tout le reste, comme les titres de chapitres qui collent parfaitement à leur contenu tout en étant des titres de films, ou encore les innombrables références à la pop culture.
Un regret, un seul, si je dois en émettre un, c’est le regard porté dans l’intrigue sur le milieu éditorial. Il pourrait laisser croire qu’il suffit de signer un roman en maison d’édition pour voir son texte porté et promu par son éditeur, avec soirée de lancement et séances de dédicaces organisées et défrayées. Alors que – et je ne parle pas que pour moi, je connais un très grand nombre de personnes qui pourraient témoigner dans le même sens –, ce traitement de faveur n’est réservé qu’à une toute petite poignée de l’immense masse laborieuse des raconteurs et raconteuses d’histoires publié·e·s à compte d’éditeur.
Bref, digression à part, pour conclure : cette comédie romantique est un véritable bijou, poli jusque dans ses moindres détails. Une pépite. Un de ces livres dont on se dit, tout au long de la lecture et longtemps encore après l’avoir refermé, que si on arrive à écrire quelque chose d’approchant un jour, alors on pourra mourir en paix.
Quelques extraits
Difficile de choisir, je crois que j’aurais pu surligner tout le livre ! Alors ce ne sont pas les passages les plus marquants, sans doute, mais ce sont des extraits qui, pour une raison ou une autre, ont trouvé un écho particulier en moi.
Même la moquette sait que je n’ai rien à foutre ici.
Ça chuinte de dédain sous mes baskets. Hôtel Meurice, cinq étoiles, troisième étage.
Bref, je suis comme tous les geeks. Un peu fétichiste. Un peu fêlée.
Et pourtant, rien n’aurait pu me préparer à ça.
Marianne, coincée dans un palace londonien.
À table avec cinq Docteurs.
Oui, cinq. En chair et en os.
Depuis le temps que la série existe, le héros a souvent changé d’interprète. À chaque fois, il se « régénère ». Comment ? En pissant de la lumière comme un lampadaire incontinent. Ça jaillit de partout, on n’y voit plus rien, et puis… pouf. Un acteur tout neuf.
Ce soir, ils ne sont pas tous là. Certains sont morts. Ou trop vieux. Ou fâchés. Mais c’est déjà beaucoup pour une seule fan. Six places à table. Six homards. Cinq Docteurs.
Et moi.
Quand j’ai entamé mon « Code de protection temporelle », j’étais tellement exaltée que j’ai failli aller respirer dans un sac.
« Article 1 : Tout contact délibéré avec un ascendant direct est un crime contre le Continuum. Article 2… »
Jamais trouvé l’article 2, ni les suivants. Pas su quoi faire de mon héroïne, une fliquette spécialisée dans les disparitions – les gens dont on s’en va tuer les ancêtres, pour les effacer de l’Histoire. Ou l’art de s’enliser dans un infini bourbier de paradoxes : comment peut-on enquêter sur l’absence de quelqu’un qui n’existe plus ? qui n’a jamais existé ? Disparition de la disparition.
Forte migraine.
Je n’ai pas de plan, pas d’intrigue, à peine une poignée de personnages secondaires pâles comme des figurants mal payés.
Pour le moment, on dirait qu’il scrute la salle de cinéma à travers une vitre. Je me sens repérée. Oui, moi.
L’œil était dans l’écran et regardait Marianne.
Voilà ce qu’on gagne, à batifoler avec une star. Une bonne vieille MST. Mégalo Sexuellement Transmissible.
Au bilan
Je le répète : un immense coup de cœur. Lisez-le.
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