Avis sur Le Livre jaune de Michael Roch

Un roman qui m’a rappelé avec violence pourquoi je préfère la littérature dite « populaire ».

Le roman

Genre : fantasy

Éditions Mu / Folio SF
Disponible en versions brochée, poche et numérique

Résumé

Un pirate s’échoue sur les rivages de Carcosa, la Cité d’Ailleurs.
Persuadé d’être mort, il est amené par Maar, un aveugle qui semble tout savoir de lui, au Roi en jaune. Ce dernier, hanté par le souvenir de ses amours, lui propose de revenir à la vie s’il parvient à le débarrasser de sa malédiction.
Commence alors la quête du pirate à la recherche de son propre trésor perdu, Ananova, la femme qu’il a tant chérie et pleurée.

Avec Le Livre jaune, Michael Roch nous plonge dans un drame féerique et poétique aux confins du cosmos, derrière Hastur, Aldébaran et les Hyades.

Mon avis

J’avais entendu dire que Le Livre jaune était une lecture exigeante. J’ai constaté en le lisant qu’elle était trop exigeante pour moi.

D’abord, parce que le livre est empli de références dont je ne connais, au mieux, que le nom. Notamment au Roi en jaune, de Chambers. Et que ne les connaître que de nom ne suffit pas.

Ensuite, parce que le style est travaillé à l’extrême. Je vous ai mis quelques extraits ci-dessous, jugez par vous-mêmes. Or, si j’ai été touchée par certaines phrases ou images, je fais partie de ces personnes qui préfèrent les romans dont le style s’efface au service de l’intrigue. Ici, il m’a semblé que l’auteur faisait l’exact inverse et, sur la longueur, cela m’a laissé surtout une impression de pesanteur.

L’enseignement que je tire de cette lecture, c’est que la littérature intellectuelle ne me convient pas : je préfère et assume m’en tenir à la littérature dite « populaire ».

Quelques extraits

Le ton de sa voix m’était familier, non pas parce que je l’avais déjà entendu, mais parce qu’il avait sous la glotte l’intonation qu’ont les vieux bourlingueurs et autres chasseurs de trésors. Il avait la bouche mauvaise, salée de rire et d’affronts, miellée d’honneurs et d’aventures.

Nous courûmes affolés, sous les cafards et les rats morts, sous les colombes cendrées et les serpents noueux qui quittaient les cieux noircis de brumes malades. Ils assommèrent les tuiles et les gouttières, fracassèrent les vitres et les lanternes, gorgèrent les rigoles et les tombeaux. Puis ce furent les briques, les caillasses et les cordes qui frappèrent nos têtes, puis les terrasses, les maisonnées, les campaniles et les guette-ciel. Nous fûmes raclés, percutés, trimbalés comme une vieille coque perdue dans une tempête de viletés. Nous tracions nos vies dans ce brouillard agressif, immergés par une altérité qui retournait en poussière en même temps qu’elle nous brûlait le corps. Nous nous noyions dans l’engloutissement d’une cité qui tairait son secret, qui le tairait jusqu’à le perdre comme un trésor du fond des mers, et qui n’en céderait aucun indice, aucune pièce, aucune croix marbrée.

Mes traits n’avaient plus la même énergie. Ma figure me semblait vieille, fantomatique. Mes dents s’étaient cariées d’un temps enclepsydré et la lividité de mon âme teintait mes tempes de nuages violâtres. La vie avait laissé ses entames sur mon visage de bourlingueur. Elles me rappelèrent qu’être moi-même avait été la tâche la plus ardue.

« Je ne t’aime plus, et je ne sais pas pourquoi. »
La vie m’avait abandonné, puis délaissé sur les rivages obscurs d’une terre inconnue. Sans repère ni attache, on ignore où aller. On erre sur les grèves avec la sensation d’un décalage, d’être à côté ou ailleurs, et plus du tout au bon endroit, plus jamais au bon endroit.

Nous descendîmes la déchirure. Nous pataugeâmes une heure ou un siècle dans le marc odorant du terrier de mon incarnation. La pierre et les boisages laissèrent place à la roche brute et glacée, nous débouchâmes enfin sur une grotte plus large que toutes nos attentes.

Au bilan

Je suis passée complètement à côté de ce court roman.

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